Le jour où j’ai visité mon nouveau château à Trakai

Alors qu'hier soir la météo annonçait de la pluie sur Vilnius et Trakai, nous avons droit à un soleil radieux ce matin. Je vérifie sur internet le temps à Trakai et.... soleil !!! Je déjeune en vitesse, attrape mon sac photo et cours jusqu'à la gare. Je demande un billet de train pour Paneriai.

C'est où ? C'est quoi ? Paneriai, c'est un endroit tristement célébre, à 10km de Vilnius, où les nazis ont exterminé les 3/4 des 100 000 juifs de la capitale. Aujourd'hui, c'est un village composé d'isbas et de petits immeubles au milieu des arbres, avec 2 rues goudronnées et le reste en chemins de terre. En suivant la route sur ma droite en sortant de la gare et en marchant sur 1 km, j'arrive au mémorial. J'entends au loin de aboiements de chiens et je m'attends à tout moment à en voir surgir un de je ne sais où. C'est archi désert et plutôt glauque, perdu au milieu de la forêt. Le petit musée est fermé aujourd'hui (lundi), mais un plan me permet d'arriver aux différents puits où les nazis tentaient de camoufler leur crime en brûlant les corps de leurs victimes et aux monuments qui leur rendent hommage. Dans l'absolu, ce n'est qu'une forêt comme les autres, mais je m'imagine à la place de ceux qui sont morts ici, dans un cadre aussi paisible, avec peut-être le chant des oiseaux et certainement le fracas répété et régulier des balles des nazis. J'ai encore ce bruit qui résonne dans ma tête depuis l'exposition temporaire sur Katyn, au musée de l'insurrection de Varsovie... ça fait froid dans le dos. En mourant ici, on doit avoir l'impression de mourir dans l'indifférence la plus totale, sans aucun témoin, personne pour se souvenir de vous ou de ce que l'on vous a fait.

Je finis par retourner vers la gare, n'osant pas m'aventurer plus loin... ça me fiche les chocottes ces aboiements et le fait d'être toute seule à un endroit où je ne vois pas à plus de 10 mètres de moi à cause du relief.

De retour à la gare, la mauvaise nouvelle tombe : je dois attendre 1h30 qu'un train arrive. J'avais lu qu'il y avait environ 24 trains par jour, mais voilà, ils ne disaient pas quand. Il ne me reste plus qu'à faire du tourisme autour de la gare : un tour au milieu des isbas, une traversée du pont au-dessus des nombreuses voies ferrées, un tour au magasin local (de type soviétique : 5 vendeuses pour très peu de produits, les produits sont derrière des vitrines ou sur des étagères derrière la vendeuse, vous demandez ce que vous voulez et on vous le donne, pratique pour lire ce que c'est ou pour voir la date de péremption, et encore plus pratique quant on ne parle pas lituanien). Je ressors de là avec un bon pique-nique et m'installe sur le quai de la gare, au soleil, un arbre en fleur derrière moi. Le luxe, version touriste en Lituanie.

Mon train arrive enfin (à l'heure) et s'arrête au vieux village de Trakai. J'avais lu qu'on y trouvait de vieilles maisons en bois, mais j'ai l'impression d'avoir fait le tour et je n'ai rien vu de particulièrement impressionnant. Heureusement que mon train s'y arrêtait car sinon j'aurais loué un vélo et fait 6 km à l'aller et autant au retour, ce qui m'aurait fort déçue. Là, je me dis que j'ai fait une balade sympa, dans un endroit charmant, et j'ai même vu un ancien monastère, tout au bout du village. Je suis retournée à la gare à temps pour le train suivant en direction de Trakai (pas le vieux village, mais la ville du même nom).

Et là, ouaaaahh ! Dès la descente du train, j'aperçois un lac dans lequel se relètent les nuages et les arbres des alentours. Entre la gare et le château de Trakai, il faut marcher 2 km, ce qui est un vrai délice avec un paysage pareil. On entre assez rapidement dans la ville, mais elle est très jolie et la route est bordée de vieilles maisons de bois, visiblement repeintes chaque année. Il y a bien évidemment également des immeubles, mais l'impression générale est fort agréable.

Et là, soudain, devant moi, le château, majestueux sur son île, entouré de voiliers, canoés et pédalos. Splendide !
Pour aller jusqu'à ce château de conte de fées, il faut suivre un premier pont de bois jusqu'à une première île, puis prendre un second pont de bois pour se retrouver devant la porte.

Le château date de la fin du XIVème siècle, est peu à peu tombé en ruines et a récemment été totalement restauré. C'est un ensemble grandiose. On pénètre tout d'abord dans une vaste cour, puis l'on passe un pont levis pour entrer dans une autre cour, au centre du bâtiment le plus haut. Je me sens toute petite là en bas. J'étais loin d'imaginer une si grande construction.

Trakai est connu pour son château et pour sa culture karaite, La secte Karaite (dont le nom vient de kara, qui signifie "qui étudie les écritures", aussi bien en hébreux qu'en arabe), est originaires de Bagdad et suit la Torah (rejetant le Talmud des rabbins). Vers 1400, le Grand Duc de Lituanie, Vytautas, ramena de Crimée environ 380 familles de Karaites, employés comme gardes du corps.
Il y a à Trakai un musée consacré à la culture Karaite, mais il n'est ouvert que du mercredi au dimanche... et aujourd'hui, on est lundi, de plus il est 18h. Tant pis, pisque c'est comme ça, je boude et je rentre à Vilnius en bus.

De retour à l'hôtel, je m'écroule sur mon lit et ne bouge même pas un cheveu pendant une heure tellement je suis épuisée de ma journée.

Coût de la journée : environ 9 euros
- transport Vilnius-Paneriai-Trakai-Vilnius : 11,50 litai (environ 4 euros),
- visite du château + autorisation de faire des photos : 12 + 4 litai (environ 5 euros)

Les photos du jour :

Commentaires

Avez-vous ri, pleuré, eu envie de partager une expérience en me lisant, ou aimé les photos... ou pas... et si vous m'écriviez un petit mot ? Les questions sont les bienvenues même si je ne suis pas sûre d'avoir la réponse

2 commentaires sur “Le jour où j’ai visité mon nouveau château à Trakai”

  1. phil-ze-frog dit :

    Trop bien !
    Et bravo pour la comparaison ancienne et actuelle de ces sinistres Puits. Intéressant aussi de réfléchir à ce qui peut transformer un humain, avec sa chair, son sang, ses émotions, son amour de ses enfants et amis, en machine, inflexible acteur d'un boucherie de masse.
    Quand l'homme écoute son cerveau (Cortex, veux-je dire), cela donne de très piètres résultats.
    S'il pouvait écouter son cœur...
    J'en ai le souffle coupé (et j'adore votre récit).
    Bon.. mince, faut que je travaille, maintenant... pour faire "bouillir la marmite", comme on dit... (>> soupir<<).

    • Sandrine77 dit :

      Euh, oui, vous feriez mieux de travailler, car si le patron voit que vous postez des commentaires sur mon blog, il va pas être content. C'est qu'il est sévère le boss, vous savez ?

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